C'est une évidence : l'Est de la Libye est aux mains des opposants et le « système » Mouammar Kaddafi s'effondre. Mais il bouge encore. Le « Guide » a promis des « boucheries » aux Libyens qui se rebelleraient contre lui. « Jusqu'à la dernière goutte » de son sang, il va se battre pour leur faire payer le prix de leur audace. Comment va-t-il s'y prendre ? Pour y voir clair, il faut revenir sur la nature du régime de Kaddafi.
Depuis qu'il a pris le pouvoir en 1969, avant même de déclarer la Libye « jamahiriya » (république populaire » en 1977, il s'est appuyé sur les rivalités tribales et politiques pour asseoir son pouvoir, et s'est employé à effacer les structures traditionnelles pour installer un contrôle personnel en développant sur un vaste réseau sécuritaire.
Dans la réalité, malgré l'habillage idéologique du régime (troisième voie et Livre vert), Mouammar Kaddafi exerçait un contrôle absolu. Les partis politiques étaient interdits, toute dissension était muselée par les puissants comités populaires et surtout par les membres de la tribu des Gadadfa originaire du sud du pays, dont l'ex-leader est issu.
Diviser pour mieux régner
Car les membres des comités révolutionnaires, la structure la plus proche d'un parti politique, étaient soigneusement choisis dans les tribus en fonction de leur allégeance. Mouammar Kaddafi jouait aussi des tribus les unes contre les autres pour qu'aucune large coalition ne puisse contrebalancer son pouvoir.
Les affiliations tribales jouent un rôle important, comme réseaux sociaux pouvant servir à l'avancement dans les carrières, la mobilité sociale et les mariages. Mais leur importance politique est moins évidente. On se souvient que le « Guide » avait appelé les chefs de tribus à « contrôler leurs jeunes ». Ce qu'ils n'ont pas vraiment réussi à faire, s'ils ont vraiment essayé...
« L'urbanisation et le développement font que les chefs de tribus ont moins d'influence sur leurs membres », estime Mohammad Fadel, un chercheur libyen indépendant basé à Londres. « Les tribus fonctionnent de la même manière qu'une famille, avec des désaccords politiques comme à l'intérieur d'un cercle familial », explique-t-il.
Par-delà les vieilles appartenances
Seif el-Islam, le fils de Kaddafi a fait planer lundi la menace d'une guerre civile, sous-entendant que les violences avaient une nature tribale. Or cette analyse semble infondée – et c'est pour cela que le régime est en train de tomber. Un large mouvement est né contre Kaddafi, qui réclame des réformes et prend le dessus sur les structures de pouvoir traditionnelles.
« Kaddafi avait réussi à créer un équilibre entre les tribus et les clans, mais ce système connaissait déjà un effritement. Aujourd'hui cette structure de pouvoir est en train de s'effondrer. Certaines tribus le lâchent », affirme Delphine Perrin, spécialiste de l'Afrique du nord à l'Institut universitaire européen de Florence (Italie). De fait, récemment, plusieurs chefs de tribus, dont ceux de Werfalla (la plus grande de Libye), ont soutenu l'opposition. « Leur capacité de mobilisation dans leurs régions est ce qui rend le régime de Kadhafi nerveux. Il va tenter de les isoler géographiquement les uns des autres », note Molly Tarhouni, une chercheuse londonienne.
La principale force de Kaddafi est aussi sa principale faiblesse : au fil des ans, le « Guide » s'est surtout consacré à renforcer sa propre tribu, avec des armes et de l'argent. « Son point fort est le Sud (Sebha), d'où vient sa tribu et d'où il ramène des mercenaires tchadiens », affirme un spécialiste de la Libye qui veut rester anonyme. « Pour faire tomber Kaddafi, il faut commencer par cette région », souligne cet analyste.
Le chef des renseignements Abdallah Senussi et l'ancien bras droit de Mouammar Kaddafi, le très redouté Abdelsalam Jalloud, appartiennent aux deux autres grandes tribus du sud, Mgerha et les Hsaouna. Kaddafi doit désormais compter sur sa garde rapprochée et peut trouver refuge a beaucoup d'endroits. Il a les moyens de résister encore un certain temps. (Avec AFP)
Depuis qu'il a pris le pouvoir en 1969, avant même de déclarer la Libye « jamahiriya » (république populaire » en 1977, il s'est appuyé sur les rivalités tribales et politiques pour asseoir son pouvoir, et s'est employé à effacer les structures traditionnelles pour installer un contrôle personnel en développant sur un vaste réseau sécuritaire.
Dans la réalité, malgré l'habillage idéologique du régime (troisième voie et Livre vert), Mouammar Kaddafi exerçait un contrôle absolu. Les partis politiques étaient interdits, toute dissension était muselée par les puissants comités populaires et surtout par les membres de la tribu des Gadadfa originaire du sud du pays, dont l'ex-leader est issu.
Diviser pour mieux régner
Car les membres des comités révolutionnaires, la structure la plus proche d'un parti politique, étaient soigneusement choisis dans les tribus en fonction de leur allégeance. Mouammar Kaddafi jouait aussi des tribus les unes contre les autres pour qu'aucune large coalition ne puisse contrebalancer son pouvoir.
Les affiliations tribales jouent un rôle important, comme réseaux sociaux pouvant servir à l'avancement dans les carrières, la mobilité sociale et les mariages. Mais leur importance politique est moins évidente. On se souvient que le « Guide » avait appelé les chefs de tribus à « contrôler leurs jeunes ». Ce qu'ils n'ont pas vraiment réussi à faire, s'ils ont vraiment essayé...
« L'urbanisation et le développement font que les chefs de tribus ont moins d'influence sur leurs membres », estime Mohammad Fadel, un chercheur libyen indépendant basé à Londres. « Les tribus fonctionnent de la même manière qu'une famille, avec des désaccords politiques comme à l'intérieur d'un cercle familial », explique-t-il.
Par-delà les vieilles appartenances
Seif el-Islam, le fils de Kaddafi a fait planer lundi la menace d'une guerre civile, sous-entendant que les violences avaient une nature tribale. Or cette analyse semble infondée – et c'est pour cela que le régime est en train de tomber. Un large mouvement est né contre Kaddafi, qui réclame des réformes et prend le dessus sur les structures de pouvoir traditionnelles.
« Kaddafi avait réussi à créer un équilibre entre les tribus et les clans, mais ce système connaissait déjà un effritement. Aujourd'hui cette structure de pouvoir est en train de s'effondrer. Certaines tribus le lâchent », affirme Delphine Perrin, spécialiste de l'Afrique du nord à l'Institut universitaire européen de Florence (Italie). De fait, récemment, plusieurs chefs de tribus, dont ceux de Werfalla (la plus grande de Libye), ont soutenu l'opposition. « Leur capacité de mobilisation dans leurs régions est ce qui rend le régime de Kadhafi nerveux. Il va tenter de les isoler géographiquement les uns des autres », note Molly Tarhouni, une chercheuse londonienne.
La principale force de Kaddafi est aussi sa principale faiblesse : au fil des ans, le « Guide » s'est surtout consacré à renforcer sa propre tribu, avec des armes et de l'argent. « Son point fort est le Sud (Sebha), d'où vient sa tribu et d'où il ramène des mercenaires tchadiens », affirme un spécialiste de la Libye qui veut rester anonyme. « Pour faire tomber Kaddafi, il faut commencer par cette région », souligne cet analyste.
Le chef des renseignements Abdallah Senussi et l'ancien bras droit de Mouammar Kaddafi, le très redouté Abdelsalam Jalloud, appartiennent aux deux autres grandes tribus du sud, Mgerha et les Hsaouna. Kaddafi doit désormais compter sur sa garde rapprochée et peut trouver refuge a beaucoup d'endroits. Il a les moyens de résister encore un certain temps. (Avec AFP)